Pension

Pour moi la liberté !

Cela peut sembler paradoxal … Je m’explique : jusqu’à mes 8 ans, je suis dans l’appartement de mes parents, au 5° étage, rue Lamarck, à Paris. Si je quitte notre logement (ce que je n’ai jamais fait), ma mère s’en aperçoit tout de suite. Mais dans un grand groupe (200 élèves environ), il n’y a pas UNE adulte derrière chaque jeune !

Les trous dans la raquette !

Je remarque dans les toutes premières années (entre mes 8 et mes 10 ans) que je peux, par exemple, « monter au dortoir » dans la journée, ce qui, en principe est interdit. Si je veux tester la surveillance ou simplement aller chercher un mouchoir, je demande à aller aux toilettes. Si je croise une religieuse dans la cour, je ne m’enfuis pas, je la regarde dans les yeux et lui dit bonjour. Elle croit que j’ai la permission de sortir …. Le tour est joué.

Quelques souvenirs en vrac : lait de Mendes France, cela ne dure pas longtemps, je n’aime pas cela, car il y a de la peau …

Goût des langues : je demande aux grandes de m’apprendre des mots d’anglais, j’ai un petit carnet où j’écris ce qu’elles me dictent. La première phrase « my tongue is clean » ????

Ce que j’aime

Les événements dont la fête de la Ste Catherine : le 25 novembre, les « grandes » (terminales) nous réveillent déguisées et toute la journée, c’est la fête …
Les promenades, l’uniforme, les chants en rang
Le grand vent
Les récréations
Je fais enrager les religieuses avec mes livres couverts …On ne pouvait pas lire de romans ou autres, sans les avoir fait « visés » par une religieuse. Un jour, en étude, je ferme brusquement un livre au passage de la surveillante. Elle me demande alors d’ouvrir ce livre, je récite (un peu). Elle finit par l’ouvrir : oh surprise, c’est un livre de classe ! je souris intérieurement …
J’élève aussi une salamandre, elle s’échappe en classe >>> panique des élèves.

Ce que je n’aime pas : peu de choses dont la « soupe au pain »

Sentiment d’être de trop sur cette terre !

A 11 ans, en 6°, j’ai donné ma vie parce qu’une camarade de pension, d’un an de moins que moi, Christine LEPESTEUR, fille du docteur de St Pierre Eglise qui était notre médecin en pension, apprend que sa mère est très malade. Elle décède.
Je me trouvais inutile, et j’étais persuadée que personne ne m’aimait, aussi je voulais mourir à sa place, je le pensais très fort, mais je n’ai rien tenté à l’époque.

Je n’ai pas été une ado « rebelle » en apparence, et je n’ai jamais fait les 400 coups, mais je n’étais pas très heureuse, me sentant incomprise par mes parents.

J’ai pu littéralement « survivre », grâce à des adultes qui m’ont épaulée, et surtout mes amies de pension. J’avais conscience qu’il fallait que j’attende ma majorité (à l’époque 21 ans) pour pouvoir « voir le monde ». Je me suis donc réfugiée dans les livres et j’ai essayé de ne pas trop faire de vagues.

J’ai eu la chance de partir en Angleterre à l’âge de 12 ans, pendant un mois, pour un échange avec une jeune anglaise, Patricia, (dont le père, André, était venu jeune dans la famille de ma mère …). J’ai eu le « coup de foudre » pour ce pays. J’ai découvert la télévision que nous regardions un peu tous les soirs. J’aimais la cuisine, le mode de vie, les transports. J’ai même fait du cheval avec Patricia qui adorait monter à cheval. J’aurais voulu rester en pension là-bas, mais je n’ai pas osé demander cela à mes parents …

J’ai donc passé 4 étés en Angleterre, dont deux au bord de la mer, dans une petite île (Hayling Island) près de l’ile de Wight … de bons moments.

En pension à St Pierre Eglise (Manche) de la 8° à la 3° en redoublant ma 5°, j’acquiers progressivement la réputation d’une forte tête. En fait, je refuse certaines méthodes pédagogiques tout en m’intéressant à beaucoup de choses. En particulier, en 3°, je refuse d’apprendre par coeur les verbes irréguliers en espagnol… je n’en vois pas l’utilité. J’ai une moyenne de 7 sur 20 … Les religieuses, ne voulant pas fausser leurs statistiques, ne voulaient pas me présenter au BEPC, de peur d’un échec. Mais ma mère entendant à la radio que c’était le dernier jour pour s’inscrire, demande qu’on m’inscrive. Je passe l’examen tout à fait décontractée (cela m’a peut être sauvée …) et je suis reçue. Cela me donne confiance en moi.

Pension ND, à Lisieux

Mes parents nous changent d’école et nous rapprochent de Paris. Avec mes soeurs, nous sommes à Lisieux. La première année, dans la même chambre, ce qui ne me plait qu’à moitié. J’ai toujours essayé d’avoir ma « chambre à moi » (voir Virginia WOOLF). Je rentre en seconde, et oh miracle, je deviens l’élève modèle. Je commence à faire de l’introspection, et je me dis que je n’ai pas changé du tout au tout en un été ! Je commence à me rendre compte qu’une réputation vous suit et vous empêche d’évoluer. C’est d’ailleurs ce que j’entends dire, dès années plus tard par un professeur en fac « quand un enfant a une mauvaise réputation à l’école, il faut le changer d’établissement« . Ce n’est pas toujours possible, en tout cas, pour moi, cela a bien fonctionné.

Je suis très sage, et j’ai un rythme de vie très régulier : je me couche tous les soirs à 22h et je me lève à 7h. Le WE, quand nous n’allons pas voir nos parents à Paris, nous sortons chez une tante (soeur de ma mère) très sympa, qui habite dans une grande demeure, avec 20 chambres. La Monteillerie (avec toute la bande de gamins nous faisons des cabanes en fougères dans le parc, ou reste au grenier les jours de pluie). Le dimanche, je m’avance pour la semaine : d’abord le devoir de maths que j’adore, puis le reste, rédaction ou dissertation, je m’en souviens plus très bien. Je fais aussi une petite sieste.

Puis comme je faisais de l’espagnol en 2° langue, j’ai demandé à partir en Espagne. Je me souviens avoir proposé d’être « au pair » car on commençait à en parler. Mes parents ont trouvé une famille à Barcelone, dont les parents avaient rencontré des amis de la famille qui passaient leur été là-bas.

Et 2° coup de foudre pour un pays étranger. à 16 ans, ce sont mes premières vraies vacances « libres ». Ma « correspondante » cette fois est un garçon, Sergi, de 18 ans, très sympa et gentleman. Il a une vespa, et m’emmène voir de nombreux films. Nous allons souvent à la plage. Je dors dans la chambre de sa soeur ainée qui était partie avec une amie aux Baléares. Suis étonnée de voir une chambre sans pratiquement de fenêtre (juste une ouverture sur une cour intérieure). Je rencontre des allemands (une mère, son fils de 18 ans et sa fille) à la plage. Je resterai en contact par espagnol avec le jeune homme, qui viendra me voir quand j’étais en terminale à Sannois. Puis je l’ai perdu de vue. Récemment j’ai réussi à retrouver son téléphone en Allemagne, mais il semble qu’il soit décédé.

Mes parents ont déménagé de Paris à Eaubonne (95) près d’Enghien. Mon père a acheté une grande maison avec deux tourelles (j’ai su plus tard que mes camarades de Bury l’appelaient le « chateau »). Il y a 6 chambres : 3 au premier (mes parents, ma plus jeune soeur et une belle chambre d’amis), et 3 au deuxième étage (mon autre soeur, mon frère et moi). J’hérite de la plus grande chambre, avec deux banquettes en coin, et un mini grenier (dans une des tourelles). Je commence à amasser de la documentation : je me souviens, je fais des dossiers dans des chemises en carton, en découpant des articles dans les journaux.

Passionnée par l’histoire, je suis abonnée à HISTORIA et suis incollables sur les familles régnantes. En particulier, je peux réciter les rois et reines d’Angleterre depuis Elisabeth II jusqu’à Charles 1er je crois …

J’ai un mon bac de première (à l’époque, il se faisait en deux parties) du premier coup. L’une des 3 sur toute la classe.

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